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Alibaba et Amazon accélèrent leur présence en Arabie Saoudite

Julien Fontaine

Le projet Vision 2030 du prince héritier Mohammed ben Salmane attire à nouveaux les géants de la tech. Les uns ont besoin de la technologie, les autres du marché. Un point sur le cloud, la vente en ligne, la logistique et la technologie dans une région où les nouvelles relations entre le Royaume et Israël modulent un marché au centre d'enjeux géopolitiques et macro-économiques qui dépassent parfois l'imagination.

Plan de l'article:

  • Un contexte temporairement peu propice aux affaires
  • Huaweï au centre d'enjeux multiples
  • Google et Alibaba se partagent le Cloud
  • L'enjeu de la ventes en ligne (Cainiao Network & Amazon au Moyen-Orient)
  • Le plan pharaonique Vision 2030

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A LIRE: Le e-commerce au Moyen-Orient (ante-covid)


Un contexte temporairement peu propice aux affaires

Jeff Bezos et le prince héritier Mohammed ben Salmane (MBS) n'étaient pas les meilleurs amis du monde, suite à la fuite de photos embarrassantes du magnat américain possiblement organisée par les services secrets saoudiens en représailles aux déclarations de Bezos sur une futile histoire de collaborateur du Washington Post découpé en morceaux dans l'ambassade saoudienne en Turquie.

Quand la plateforme américaine s'est officiellement lancée en Arabie saoudite en juin 2020 sour le nom Amazon.sa, la querelle publique entre Bezos et le prince héritier saoudien avait déjà éclatée. La saga avait alimenté les spéculations selon lesquelles Amazon pourrait se retirer des affaires dans le pays, mais, la société de Seattle a suivi son plan au Moyen-Orient alors qu'elle avait racheté pour $580 millions la plus populaire place de marché de la région, Souq.com en 2017.

Le 2 octobre 2018, Jamal Khashoggi, un chroniqueur du Washington Post et critique acerbe du gouvernement saoudien, a été brutalement assassiné et démembré à l'intérieur du consulat du Royaume à Istanbul par une équipe d'agents saoudiens. Ses chroniques critiques écrites dans le Washington Post, que Bezos avait acheté en 2013 en tant qu'investissement personnel, n'avaient pas été du goût de Riyad. Depuis lors, un rapport des Nations Unies a imputé la responsabilité de «l'exécution préméditée» à l'État saoudien et a soulevé des inquiétudes concernant la surveillance intérieure et extra-territoriale ainsi que la sécurité des proches contacts de Khashoggi.

En 2018, avant le meurtre du dissident, Amazon était en pourparlers pour construire des centres de données en Arabie saoudite qui auraient donné à l'américaine un meilleur accès au marché du Moyen-Orient et permis à MBS d'accélérer les plans ambitieux de son projet Saudi Vision 2030 élaboré pour transformer l’économie du pays, réduire sa dépendance au pétrole et moderniser sa société. Le Royaume veut clairement exploiter son emplacement géographique unique pour devenir «la plaque tournante mondiale connectant trois continents: l’Asie, l’Europe et l’Afrique».

Le meurtre de Khashoggi a suscité d'intenses critiques internationales à l'encontre de l'Arabie saoudite et a incité de nombreuses entreprises à couper les liens pendant un certain temps. Les négociations alors en cours avec Google, Warner Bros, Virgin Galactic et Virgin Orbit, les sociétés spatiales de Richard Branson n'avaient alors pas abouti. AMC Entertainment, la plus grande chaîne de cinéma au monde, avait suspendu un projet d'ouverture de 40 salles, alors que le pays venait de mettre fin à une interdiction de 35 ans en projetant un Marvel dans le premier cinéma de Riyad en avril 2018.

Fin 2018, le fonds d’investissement public saoudien avait investi ou engagé environ 100 milliards de dollars dans des investissements à l’étranger dans des entreprises telles que Tesla et Uber. Il était le principal contributeur de SoftBank Vision Fund à hauteur de 100 milliards de dollars. Le rang de l'Arabie saoudite parmi les plus grands investisseurs mondiaux, son besoin d'attirer des partenaires étrangers pour l'aider à sevrer son économie du pétrole et surtout la manne financière ne pouvaient laisser plus longtemps les acteurs dans le statu quo.

Le sable coulant sous les ponts, l'offre et la demande n'allaient pas attendre l'annonce du proche retrait de la direction d'Amazon de Bezos en début d'année pour se rencontrer à nouveau. Aujourd'hui, les entreprises technologiques occidentales reviennent dans la course avec leurs homologues asiatiques.

Le virus fait passer la technologie de la périphérie au centre de la scène des plans de transformation commerciale du royaume», Sam Blatteis, qui dirigeait auparavant les relations gouvernementales de Google dans le golfe Persique.

Les initiatives adoptées par l'Arabie saoudite dans le cadre de son objectif «Vision 2030» ont placé le Royaume au rang de pays le plus élevé au monde en termes de vitesse de progression dans le classement de l'indice des infrastructures numériques, alors que le Royaume a progressé de 40 places, au 8e rang du Groupe des vingt pays dans le rapport 2020 publié par les Nations Unies.

Le ministère de l'investissement saoudien s'attend à ce que d'ici 2022, l'utilisation d'Internet en Arabie saoudite atteigne 82,6% de la population contre 73,2% en 2017. Avec une jeune population (60% a moins de 35 ans) de près de 35 millions d'habitants, près des trois quarts des Saoudiens sont connectés aux médias sociaux, plus qu'aux États-Unis et en Chine.

L’Arabie saoudite a marqué un jalon en novembre dernier après le couronnement de la première licorne technologique du pays et première fintech du Moyen-Orient. L'américaine Western Union, la plus grande société de transfert d'argent au monde, a pris une participation de 15% pour 200 millions de dollars dans le portefeuille mobile STC Pay, la première fintech agréée par l'Autorité monétaire saoudienne et filiale à 100% de Saudi Telecom Company.


Huawei au centre d'enjeux multiples

Le Royaume a besoin de créer un environnement fertile de premier plan pour les investisseurs afin qu'ils puissent attirer les dernières innovations technologiques, ouvrir de nouveaux marchés et à accélérer le développement entrepreneurial. A cet effet, il entretient une relation de 20 ans avec la géante chinoise de la technologie, Huawei, qui «a joué un rôle déterminant dans le développement de l’Arabie saoudite, en collaborant avec le gouvernement et des entreprises privées pour améliorer l’infrastructure technologique de notre pays», a déclaré Khalid Al-Falih, le Ministre de l’investissement. L'administration saoudienne des données et de l'intelligence artificielle, collabore déjà avec la chinoise pour utiliser l'IA afin de reconnaître la langue et les caractères arabes.

En janvier, Huawei a annonçé l'ouverture prochaine de son plus grand flagship store en dehors de la Chine. La date d'ouverture du nouveau magasin, qui sera à Riyad, n'a pas encore été annoncée. Selon Saleh Al-Saleem, de l'Université King Saud, «l'accord impliquera certainement des programmes de formation pour transférer la technologie. Un investissement par une entreprise de cette taille sur le marché saoudien est une reconnaissance du secteur technologique dans le Royaume.»

Il est intéressant de voir que l'Arabie saoudite maintient ses liens avec Huawei, malgré le conflit commercial déclenché par Trump et la volonté américaine de ne pas voir ses alliés militaires utiliser la technologie de la chinoise. De toute évidence, le Royaume a ignoré les recommandations des États-Unis, alors que l'ancien président Donald Trump avait choisi de ne pas prendre parti contre MBS suite au meurtre du journaliste du Washington Post, arguant que l'arrêt des ventes d'armes nuirait à l'alliance américano-saoudienne. Le président Trump avait même affirmé lui avoir «sauvé son cul», écrit le célèbre journaliste d'investigation Bob Woodward dans son livre "Rage".

Fin janvier, la nouvelle administration Biden a temporairement gelé les ventes d'armes à l'Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, s'engageant à examiner une série d'accords d'armes controversés que Trump avait conclus avec les deux alliés américains dans les derniers jours de son mandat. Dans un Tweet, l'ambassade des Émirats arabes unis à Washington a déclaré: «Comme dans les administrations précédentes, les Émirats arabes unis prévoyaient un examen des politiques actuelles par la nouvelle administration

Appelant cela «une action administrative de routine», le porte-parole de la Maison Blanche a déclaré que l'examen «démontre l'engagement de l'administration en faveur de la transparence et de la bonne gouvernance, tout en veillant à ce que les ventes d'armes américaines répondent à nos objectifs stratégiques de construction de partenariats de sécurité plus forts, interopérables et plus compétents.»

L'administration Biden a subi la pression de ses homologues démocrates du Congrès pour tenir ses promesses électorales. Dès le début de sa candidature à l'élection présidentielle, Biden, avait promis de cesser de soutenir l'intervention militaire de l'Arabie saoudite contre les groupes rebelles houthis au Yémen.

Afin de nuire davantage à l'activité de Huawei, l'administration Trump avait resserré l'interdiction de commercialisation des technologies américaines par les entreprises étrangères, notamment les puces électronique TSMC. Or, les perspectives de la chinoise sont de plus en plus incertaines car sa gamme de puces Kirin qui équipe le haut de la gamme de ses smartphones utilise ces technologies.

Le vent ne semble pas tourner en faveur de l'entreprise chinoise. Aux États-Unis, le changement de présidence a quelque temps laissé planer un peu d'espoir de voir les sanctions économiques s'alléger pour Huawei et ses fournisseurs. Mais la nouvelle administration américaine a conservé la ligne tenue par Donald Trump. D'après Reuters, elle se serait même durcie, et l'administration Biden aurait modifié récemment les licences permettant aux entreprises de faire affaire avec Huawei, les empêchant d'utiliser les équipements "avec ou dans des appareils 5G" ou encore dans "l'armée, la 5G, les infrastructures critiques, les centres de données d'entreprise, les applications cloud ou spatiales". Des sources citées par Reuters indiquent que ces changements pourraient perturber les contrats convenus précédemment avec Huawei.

La révision des licences et le durcissement des mesures vont compliquer encore un peu plus la vie du constructeur de smartphones et d'infrastructures 5G. Il y a quelques semaines, et pour sa seule branche mobile, il se disait que les difficultés en approvisionnement de la marque ne lui permettraient pas de produire plus 80 millions de smartphones en 2021.


Google et Alibaba se partagent le Cloud

Du côté des investissements américains dans le Royaume, Google et le monopole pétrolier d'État Saudi Aramco se sont mis d'accord fin décembre pour fournir une infrastructure cloud à l'Arabie saoudite. Les liens technologiques entre le Royaume et la société de Mountainview surviennent alors que Google contruit un réseau de fibre optique qui reliera l'Europe et l'Inde via Israël et l'Arabie saoudite. Le projet de câble sous-marin de 5000 miles, appelé Blue Raman, devrait coûter 400 millions de dollars. L'américaine a également annoncé son intention de lancer un centre de cloud computing au Qatar, qui fait l'objet d'un blocus régional dirigé par l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, Bahreïn et l'Égypte depuis 2017.

Google ne mentionne pas ses opérations de câble sous-marin dans ses rapports financiers, mais Haaretz estime qu'elle a investi 47 milliards de dollars en 2016-2018 dans ce qu'elle nomme «l'amélioration de l'infrastructure de Google Cloud». Cet investissement impliquait l'érection de 134 fermes de serveurs et de 14 câbles sous-marins à fibre optique.

Le géant de la recherche est en concurrence avec Microsoft et Amazon sur le marché mondial en pleine croissance du cloud computing et des câbles sous-marins traditionnellement détenus et exploités par des entreprises de télé-communications. Google opère actuellement dans 24 régions avec 73 zones de disponibilité, moins que ses principaux concurrents Microsoft Azure et le leader du marché Amazon Web Services, mais plus qu'Alibaba qui a néanmoins déployé des centaines de centres de données cloud dans 22 régions du monde. Statista évaluait en octobre dernier le marché mondial du cloud à $364 milliards en 2022 (SaaS, IaaS, PaaS, BPaaS, DaaS).

Amazon Web Services a lancé l'année dernière sa première région cloud au Moyen-Orient, à Bahreïn, desservant des clients locaux de premier plan tels que la banque émiratie Emirates NBD et le service de covoiturage Careem. Microsoft a lancé son offre aux Émirats arabes unis à peu près au même moment, faisant de Google un nouvel entrant sur la scène régionale.

Le 30 décembre dernier, Saudi Telecom et le fond de capital-risque sino-saoudien eWTP Capital Arabia ont annoncé conjointement la mise en place d'un partenariat avec les services cloud d'Alibaba pour fournir des services de cloud computing hautes performances au pays. Les deux parties se sont engagées investir un milliard de dollars, à raison de 500 millions de dollars chacune au cours des cinq prochaines années.

L'accord avec Alibaba est soutenu par la Saudi Federation for Cybersecurity Programming & Drones, une institution nationale qui vise à développer des compétences professionnelles dans les domaines de la cybersécurité et de la programmation. En 2018, le SAFCSP avait organisé l'événement Hajj Hackathon à Djeddah, avec 2950 participants de plus de 100 pays, battant le record du monde Guinness de participants à un hackathon.

En juillet 2020, le géant sud-coréen Samsung a mis en place un centre de formation en collaboration destiné aux étudiants saoudiens avec la fondation personnelle du prince héritier, Misk. Le Samsung Innovation Campus s'est associé à la Misk Academy pour combler le fossé en matière de compétences dans les nouvelles technologies, faire avancer la transformation numérique du Royaume et "aider les dirigeants à concrétiser leur vision de la construction d'une économie basée sur la connaissance, conformément à Saudi Vision 2030." La première initiative offre 240 heures de cours en ligne sur l'IA et l'IoT, des exercices et un projet de synthèse sur 12 semaines. L'objectif est aussi d'autonomiser les jeunes adultes pour un nouveau marché du travail axé sur la technologie, alors que leurs parent étaient habitués à vivre de la rente pétrolière redistribuée. En 2018, le Royaume avait un objectif de croissance de la part des revenus non pétroliers sur les recettes de l'Etat de 30% en 2023 contre 10% cinq ans plus tôt.

Mais une pandémie mondiale est passée par là, établissant une nouvelle normalité que l'on découvre encore. Avec la crise sanitaire, la nécessité de rester chez soi a stimulé la consommation de divertissements en ligne. Warner Music a pris une participation dans la saoudienne Rotana Music en février pour profiter de la démographie de la région. Mais les ventes en ligne au Moyen-Orient et en Afrique (EMEA) ont aussi explosé grâces aux circonstances. Selon Criteo, elles ont bondi de 336% dans le pays l'année dernière, tandis que le trafic web global a augmenté de 170%. Pendant le dernier Black Friday, Criteo analysait +165% de ventes sur tous les marchés EMEA, dont + 512% en Arabie Saoudite.


L'enjeu de la ventes en ligne

L'Arabie saoudite est l'un des marchés du commerce électronique à la croissance la plus rapide. Elle a une forte pénétration de l'utilisation d'Internet et des smartphones, et la plupart des habitants vivent dans les zones urbaines. Elle fait également partie des 20 pays les plus riches en termes de pouvoir d'achat et combine une base de revenus importante en tant que premier exportateur mondial de pétrole.

Les revenus du e-commerce en Arabie saoudite devraient atteindre 7,051 milliards de dollars cette année et croître à un taux annuel de 5,38% pour atteindre 8,697 milliards de dollars d'ici 2025. Le segment le plus important pour les consommateurs est la mode et le panier moyen par consommateur est estimé à environ $248,69.

Mais au-delà du Royaume, c'est toute une région que les deux géants du commerce visent. BMI research évaluait en 2018 le marché de la vente en ligne au Moyen-Orient à 48,6 milliards de dollars en 2022, contre $26,9 milliards en 2018, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite étant les principaux moteurs de la croissance. Selon les propres recherches de DAFZA, le commerce électronique dans la région MENASA (Moyen-Orient, Afrique du Nord, Asie du Sud-Est) progressait à un taux annuel de 24,6% jusqu’en 2020.

Une enquête de Criteo menée à la fin de l'année dernière auprès de 900 acheteurs en ligne saoudiens a révélé que 58% des interrogés déclaraient se sentir plus à l'aise pour faire leurs achats en ligne qu'en magasin et 35% d'entre eux étaient particulièrement attentifs à la gratuité des frais de livraison.

L'enjeu de la promesse de la commodité y est aussi important qu'ailleurs. Le marché de la consommation intérieure saoudienne et des pays voisins attire logiquement les deux mastodontes de la vente en ligne, Alibaba et Amazon, qui sont avant tout des géants de la logistique inter-continentale.

Cainiao Network

À l’échelle internationale, Cainiao Network, l'opérateur logistique du groupe Alibaba, continue d’investir dans une infrastructure logistique pour servir les marchands d’Alibaba.

La branche logistique d'Alibaba, a signé début mars un accord avec la compagnie aérienne de fret aérien saoudienne Saudia Cargo. Celle-ci opérera cinq vols hebdomadaires de Hong Kong à Liège en Belgique, avec Riyad comme point de connexion, dans le but de renforcer l'infrastructure logistique d'Alibaba entre le Moyen-Orient, l'Europe et la Chine et réduire les délais de livraison des colis au consommateur final (les clients d'AliExpress en général). Saudia Cargo a déclaré que l'accord avec Cainiao consolide l'objectif de permettre à l'Arabie saoudite de devenir un «centre logistique mondial moderne».

Le Moyen-Orient est l'un des cinq principaux marchés d'outre-mer pour Cainiao, avec une augmentation du volume des expéditions de 20% l'année dernière. "Avec le lancement de nouveaux vols, les clients du Moyen-Orient pourront recevoir leurs commandes en ligne depuis la Chine en aussi peu que 10 jours. Les produits populaires parmi les clients du Moyen-Orient sont les produits électroniques, les vêtements et les produits ménagers", annonçait la société.

Nos vendeurs et nos clients de Chine, d'Arabie saoudite et d'Europe bénéficieront des nouveaux vols qui réduiront les délais de livraison de leurs colis. L'expansion de notre réseau logistique dans de nouvelles régions nous aidera également à construire un réseau d'exportation mondial efficace. Cette nouvelle route sera l'un des éléments clés pour créer une logistique transparente et augmenter la synergie entre les différentes régions», William Xiong, Group Chief Strategist de Cainiao.

Depuis le début de la pandémie, Cainiao a assuré avec un grand succès la continuité de ses opérations logistiques pour maintenir un flux régulier de produits de première nécessité, notamment grâce à l'augmentation des vols cargo vers de nombreuses destinations dans les 152 pays qu'elle dessert grâce à son réseau de 70 partenaires de l'industrie du transport.

En décembre 2020, l'opérateur logistique d'Alibaba a affrété plus de 200 vols de fret internationaux pour l'activité AliExpress, ce qui a permis de réduire le délai de livraison moyen de 3,5 jours pour les livraisons de commandes de Chine vers les marchés internationaux, selon China Internet Watch.

Au cours du dernier trimestre 2020, le chiffre d'affaires des opération logistiques de Cainiao, indépendamment des autres services d'Alibaba a atteint 1,741 milliards de dollars, en augmentation de 51% d'une année sur l'autre, principalement en raison de l'augmentation du volume des commandes transfrontalières.

De son côté, Amazon n'isole pas ses revenus issus des services logistiques (fulfillment & shipping fees). Ils sont agrégés aux autres services fournis aux vendeurs tiers mais excluent les frais publicitaires et AWS. Lors du dernier trimestre de 2020, le chiffre d'affaires généré par l'ensemble des services aux vendeurs tiers était de 27,33 milliards de dollars (+57% YoY). La globalité de ces services a généré 80,44 milliards de dollars de revenus sur l'ensemble de l'année dernière (+50% YoY), incluant les commissions sur un volume de ventes de 300 milliards de dollars de marchandises, selon les estimations de Marketplace Pulse, avec une valeur moyenne des commissions difficilement calculable.

Amazon au Moyen-Orient

Amazon s'est officiellement lancée aux Émirats arabes unis le 30 avril 2019 sour le nom Amazon.ae, après son ouverture en Turquie en septembre 2018, et en Arabie saoudite le 17 juin 2020 sour le nom Amazon.sa, remplaçant Souq.com, la plus grande plate-forme de e-commerce du monde arabe, qu'elle avait acquise pour 580 millions de dollars en 2017. L’Arabie saoudite était alors le 17e marché mondial d’Amazon.

Pour poursuivre son expansion au Moyen-Orient, Amazon a annoncé en mars qu'elle allait embaucher 1500 nouveaux employés en Arabie saoudite et ajouter 11 bâtiments à son infrastructure logistique cette année. En novembre, elle avait déjà annoncé la création de 3400 nouveaux emplois à travers le Royaume. L'entreprise avait alors souligné que 60% des nouveaux emplois à temps plein revenaient à des ressortissants saoudiens.

La société n'a pas révélé la valeur du nouvel investissement en Arabie saoudite ni une ventilation des effectifs actuels.

  • L'expansion augmentera la capacité de stockage du Royaume de 89% et son réseau de livraison géographique de 58%.
  • Le conglomérat mondial exploite actuellement trois entrepôts à Riyad et Jeddah, 11 stations de livraison et deux centres de tri.
  • D'ici la fin de cette année, ce montant sera porté à six entrepôts et 13 postes de livraison.
  • Onze nouveaux bâtiments seront ajoutés au réseau, tandis que certaines installations plus anciennes seront fermées ou modernisées.
  • D'ici la fin de 2021, le réseau de distribution d'Amazon couvrira une superficie totale de plus de 867.000 pieds carrés, l'équivalent de plus de 10 terrains de football.
  • La société de Seattle travaille également en partenariat avec Saudi Post et un réseau de 10 partenaires de service.

Les membres Prime en Arabie saoudite peuvent faire leurs achats sur Amazon.sa en arabe (support client en arabe) et en anglais à l'aide de l'application d'achat Amazon ou en visitant directement le site Web.

Ils bénéficient d'un large choix d'avantages de shopping et de divertissement d'Amazon Prime comme les plus de 150 millions de membres payants dans le monde, d'une livraison locale en un jour dans toutes les zones métropolitaines clés et en deux jours dans les autres régions et gratuitement pour les commandes dépassant les 200 riyals saoudiens (53$), que les produits soient achetés localement ou parmi les plus de 7 millions d'articles du Amazon Global Store expédiés des États-Unis en 7 jours ou des Émirats arabes unis en 2 jours.

Grâce à l'acquisition de Souq, la plateforme américaine s'est lancée sur des bases plus solides au Moyen-Orient que dans d'autres pays, spécifiquement aux Emirats arabes unis (EAU), alors qu'avec moins de 10 millions d'habitants, ils ont la plus petite population de tous les pays de la région.

Souq.com n'est plus que disponible en Égypte et devrait donc être rapidement remplacé par Amazon Egypt. Par l'intermédiaire de sa filiale Souq, Amazon y exploite déjà plus de 10 centres de distribution qui emploient environ 1.000 personnes. La société compte étendre considérablement ses opérations sur le marché égyptien dans un avenir proche. L’un des plans qui en est encore au stade de la proposition est un programme similaire à Amazon Flex, un service dans lequel les propriétaires de voitures peuvent livrer les colis d’Amazon aux clients de la même manière qu’Uber ou Careem utilisent les propriétaires de voitures privées comme taxis.

La ministre égyptien de l'Industrie et du Commerce Nevin Gamea soutient officiellement les initiatives du géant de Seattle en Egypte. Ils travaillent conjointement "au développement du commerce électronique pour tous les secteurs industriels, visant à accroître la popularité des produits égyptiens localement et à accroître les exportations égyptiennes vers les marchés étrangers." Elle a déclaré que son ministère cherchait également à "créer une plate-forme électronique complète pour afficher non seulement les produits, mais également les capacités de fabrication disponibles pour toutes les usines égyptiennes."


En février dernier, l’Arabie saoudite a annoncé qu'à partir de 2024, le gouvernement cesserait de faire affaire avec des entreprises internationales dont le siège régional n’était pas basé dans le royaume. Pour s'y implanter, les entreprises devront soit délocaliser leur siège social en Arabie saoudite, soit elles perdront des contrats gouvernementaux lucratifs.

Cette mesure est la dernière tentative du royaume de se transformer en un centre financier et touristique. Mais contester la domination de Dubaï, dans les Émirats arabes unis voisins, en tant que capitale commerciale et financière de la région, ne sera pas facile. Avec peu de la richesse pétrolière de ses voisins, Dubaï a bâti son économie sur ses références d'ouverture aux affaires et sur la promesse d'un style de vie fastueux pour les expatriés bien nantis.

Le prince héritier a assoupli les restrictions sur les concerts, autorisé les femmes à conduire et a mis fin à une interdiction de 40 ans des cinémas, des mesures mal perçues dans l'Arabie saoudite conservatrice. Mais Dubaï, qui a passé des années à attirer des entreprises et les voyageurs, possède déjà des multiplexes, des boîtes de nuit et des hôtels de classe mondiale en bord de mer qui, lorsque la pandémie ne fait pas rage, attirent des millions de visiteurs chaque année. Les Émirats arabes unis se sont classés 16e de l'indice Ease of Doing Business 2020 de la Banque mondiale, tandis que l’Arabie saoudite s’est classée 63e.

Dans ses efforts pour attirer les capitaux et en dépit des accords de libre-échange de la région, Invest Saudi, la branche de promotion des investissements du royaume, a précédemment lancé «Programme HQ», offrant des allégements fiscaux spéciaux et d’autres incitations aux multinationales. Des consultants de grandes entreprises américaines sont venus par avion chaque semaine depuis Dubaï pour développer une stratégie sur la façon dont la métropole conservatrice de Riyad pourrait concurrencer et supplanter la libérale Dubaï en tant que centre d’affaires prééminent de la région.

L’Arabie saoudite n'abrite actuellement que moins de 5% des sièges sociaux des sociétés de la région. En janvier, 24 entreprises internationales ont annoncé leur intention de déplacer leur siège régional à Riyad, notamment PepsiCo, la société française de services aux champs pétrolifères Schlumberger et la chaîne de restauration rapide canadienne Tim Horton’s.

Même si la décision saoudienne radicale est susceptible d'avoir des conséquences régionales importantes et d'accélérer une course à la modernisation entre l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, les deux restent en concurrence pour attirer les entreprises étrangères, mais les traditions et la réputation du royaume ne facilitent pas ces investissements, clé de voute du plan Vision 2030 du prince héritier. Des projets inaboutis tels que le King Abdullah Financial District, prévu depuis 2006 pour abriter des banques dans une zone d'environ quatre fois la taille la City à Londres, n'ont pas encore décollé et les tentatives d'attirer des capitaux étrangers sur ce projet ont précédemment échoué.

Le plan pharaonique Vision 2030

Néanmoins, au moment où le pays fait face à de grandes difficultés économiques provoquées par la pandémie de Covid-19 et la baisse des prix du brut, l’Arabie saoudite a annoncé fin mars un plan d’investissements de 3200 milliards de dollars répartis jusqu'en 2030 pour accélérer la diversification de son économie ultra-dépendante du pétrole, après avoir annoncé en janvier que le Fonds d’investissement public saoudien allait investir 40 milliards de dollars par an dans l’économie du pays pendant cinq ans.

Le taux de chômage y a atteint 14,9 % au troisième trimestre 2020, soit une légère baisse par rapport au record de 15,4 % atteint au trimestre précédent, selon les chiffres officiels. En 2020, le double choc de la pandémie et de la baisse des prix du pétrole a poussé le royaume à tripler sa TVA à 15 % et à supprimer des allocations mensuelles destinées aux fonctionnaires pour contenir son déficit budgétaire.

Très impopulaires au sein d’une population habituée aux largesses de l’Etat, ces mesures d’austérité ont été mises en place alors même que le royaume continue d’augmenter ses dépenses sur le projet pharaonique Neom, une mégapole futuriste au cœur des plans du prince héritier et d'intérêts convergents dans la région, mais fortement dépendante des investissements étrangers. La smart city en cours de développement mobilise un investissement de 500 milliards de dollars annoncé en 2019, dix-huit mois avant le plan de financement de $3200 milliards sur dix ans.

Les projets du prince héritier d'Arabie saoudite Mohammad bin Salman pour une mégapole appelée Neom font partie des livres et des films de science-fiction.
Alaraby

Neom est la plus grande et la plus ambitieuse d'une série de villes futuristes que les dirigeants du Golfe ont sorti du sable. Aux Émirats arabes unis, Dubaï et Abu Dhabi sont devenus des pôles commerciaux majeurs, tout comme la capitale du Qatar, Doha. Ce coin balnéaire sur la mer Rouge, au nord-ouest de l'Arabie saoudite, face à l'Egypte et au sud d'Israël, est si stérile que les seules ressources abondantes sont le soleil, le sable, les cailloux et un accès illimité à l'eau salée.

Mais quand le prince héritier saoudien a lancé le projet en 2017, l'annonce sortait de l'ordinaire: il avait élaboré un plan pour créer ex-nihilo une cité-État couvrant plus de 20.000 kilomètres carrés de désert rocheux et de côtes vides afin d'attirer «les plus grands esprits et les meilleurs talents du monde vers les emplois les mieux rémunérés au monde dans la ville la plus vivable du monde». Dans un communiqué, Neom a déclaré que le projet concernait «la technologie dans tous les secteurs tels que la mobilité, l'habitabilité, la santé et le médical, qui garantiront tous que nous fournissons le cadre de vie le plus attrayant de la planète». Les habitants piloteront des taxis drones pour se rendre au travail pendant que les robots nettoient leurs maisons. Leur ville supplantera la Silicon Valley dans la technologie, Hollywood dans le divertissement et la Côte d'Azur comme lieu de vacances.

Le projet Neom illustre le plan ambitieux du Royaume visant à se diversifier loin du pétrole et du gaz naturel et à présenter Neom en tant que plaque tournante mondiale de la technologie et de l'énergie verte. Selon le site officiel de Neom, cette zone extrajudiciaire qui cherche d'ores et déjà à devenir le centre financier et d'innovation du Moyen-Orient disposera d’un système juridique progressiste fonctionnant différemment de celui de l’Arabie saoudite.

En février dernier, une joint-venture de Neom, de la société chimique américaine Air Products & Chemicals et de la saoudienne ACWA Power, a annoncé investir 5 milliards de dollars pour construire ce qui sera la plus grande installation de production d'hydrogène vert au monde, à Neom. Les plans prévoient que l'installation, qui n'est pas encore en construction, produira 650 tonnes d'hydrogène vert par jour à partir de 2025, alors que la plus grande installation de production d'hydrogène vert actuelle au Québec produit environ 9 tonnes par jour.

Neom est la pièce maîtresse des efforts de Mohammed ben Salmane pour transformer un royaume insulaire dépendant du pétrole en un pays doté d'une économie diversifiée et tournée vers l'extérieur. Plutôt que de compter sur les revenus pétroliers pour financer les investissements auprès de pays étrangers, MBS a déclaré qu'il souhaitait que l'Arabie saoudite produise des biens et des services que les Saoudiens achètent actuellement à l'étranger. L'Arabie saoudite prévoit d'achever la première partie de Neom d'ici 2025.

Israël, pôle mondial en matière de technologies de l'information et de dessalement des eaux, et qui possède également un littoral sur la mer Rouge, semble un partenaire idéal. Il n'a pas fallu attendre la déclaration officielle d'intérêt des dirigeants de l'état hébreu pour que les entreprises israéliennes puissent vendre leur technologie aux saoudiens, les deux pays collaboraient déjà loin des projecteurs, avant le réchauffement des relations diplomatiques entre les deux ennemis historiques.

Notamment, NSO Group, une société israélienne de logiciels espions, qui a vendu son logiciel espion Pegasus aux Saoudiens, qui l'ont ensuite utilisé pour espionner Khashoggi et ses contacts. Même le téléphone de Bezos aurait alors été piraté. Des chercheurs en sécurité qui avaient pu examiner le téléphone d'Omar Abdulaziz, ami de Khashoggi et dissident saoudien notoire, ont découvert que leurs conversations privées sur WhatsApp avaient été piratées. Quelques mois après, le 2 octobre 2018, Khashoggi a été démembré au consulat saoudien à Istanbul. Abdulaziz a publiquement mis en cause des responsables saoudiens dans le meurtre de Khashoggi, soulignant que le piratage de ses conversations privées avec Khashoggi avait joué un rôle clé dans l'assassinat.

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